Politique énergétique
Facture d’électricité : les clés pour mieux comprendre
I. Une facture composée de trois briques
1. La brique associée au coût de la fourniture d’électricité, qui regroupe :
- Les coûts liés au financement des différents moyens de production (charges d’exploitation et de capital) ;
- Les coûts relevant de la commercialisation de l’électricité tels que la facturation, le service clients, les Certificats d’Economie d’Energie (CEE) ou la traçabilité de l’origine de la production de l’électricité.
2. La brique associée au coût d’acheminement de l’électricité, destinée à financer l’exploitation et la modernisation des réseaux de transport et de distribution d’électricité au travers du Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité (TURPE).
3. La brique associée à la fiscalité s’appliquant sur l’électricité. En 2021, la fiscalité représentait 34 % de la facture d’électricité d’un ménage et 46 % de celle des entreprises. Cette brique a connu la croissance la plus importante ces dix dernières années, particulièrement à cause de l’augmentation progressive de la Taxe Intérieure sur la Consommation Finale d’Électricité [1] (TICFE) entre 2003 et 2016, destinée à financer le développement des énergies renouvelables électriques. Depuis 2016, le soutien aux énergies renouvelables est financé par une part des taxes sur la consommation d’énergies fossiles.
En 2022, ces trois composantes n’ont pas connu la même évolution. Ainsi, la hausse importante des prix de l’électricité sur le marché européen, présageant une augmentation de la brique fourniture et donc de la facture, a été amortie via une baisse de la brique fiscalité (montant minimal de la TICFE) et un recours accru au dispositif de l’ARENH [2], constituant le bouclier tarifaire. Il ne faut donc pas confondre hausse des prix de gros de l’électricité avec hausse des factures.
Le saviez-vous ?
Selon Eurostat, au premier semestre 2022, l’électricité française restait une des moins chères d’Europe :
- Les ménages français ont eu en moyenne une facture inférieure de 20 % à celle de leurs voisins européens.
- Les entreprises françaises payaient en moyenne leur électricité 27 % moins chère que l’ensemble des entreprises implantées au sein de l’Union européenne.
Par conséquent, parmi les trois vecteurs énergétiques communément utilisés pour le chauffage (fioul, gaz et électricité), la facture moyenne des ménages se chauffant à l’électricité s’avère être la moins élevée, avec 600 € par an, suivi par le chauffage au gaz avec 664 € par an [3].
II. Les mesures d’accompagnement prévues en 2023
Face à une crise géopolitique qui perdure et aux tensions spécifiques qui concernent le système électrique français, le Gouvernement poursuit en 2023 sa politique de protection des ménages, des collectivités et des entreprises grâce à plusieurs dispositifs d’accompagnements visant à limiter la hausse des factures.
1.La prolongation et l’extension du volet fiscal du bouclier tarifaire, pour tous.
À compter du 1er février 2023 et jusqu’au 31 janvier 2024, le montant de la TICFE restera fixé au tarif minimal autorisé par le droit européen, c’est-à-dire de 1 € par mégawattheure pour les ménages, et de 0,5 € par mégawattheure pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille [4].
De plus, à partir du 1er février 2023, les effets du bouclier tarifaire fiscal seront amplifiés par l’intégration de la taxe communale sur la consommation finale d’électricité à la TICFE. Concrètement, la fiscalité s’appliquant à l’électricité diminuera de 6,76 € supplémentaires par mégawattheure pour les ménages et les TPE, et de 2,25 € supplémentaires par mégawattheure pour les PME [5].
2. L’accompagnement des ménages
La limitation de la hausse du tarif réglementé de vente
A compter du 1er février 2023, la hausse de la facture d’électricité des ménages ayant souscrit un contrat au tarif réglementé de vente d’électricité (TRVe) sera limitée à 15 % TTC au lieu d’une augmentation de 99 % TTC [6]. Ce bouclier concerne également les offres de marché.
Le versement d’un chèque énergie exceptionnel
Valable jusqu’au 31 mars 2024, un chèque énergie exceptionnel d’un montant de 100 € ou 200 € sera envoyé entre fin 2022 et début 2023 automatiquement par voie postale à 12 millions de ménages aux revenus modestes, sans démarche de leur part. Il vient en complément du chèque énergie « classique » déjà distribué au printemps 2022 et qui le sera de nouveau en 2023. Les ménages bénéficiaires peuvent notamment l’utiliser pour régler les factures des fournisseurs d’électricité.
3. L’accompagnement des consommateurs finals non domestiques
TPE, collectivités locales et associations de petites tailles : La limitation de la hausse du tarif réglementé de vente et l’instauration d’un plafond garanti
A compter du 1er février 2023, la hausse des factures d’électricité des TPE [7], collectivités locales, et associations qui respectent les conditions ci-dessous et qui ont souscrit un contrat au TRVe ou bien une offre de marché, sera limitée à 15 % TTC, protégeant ces entités d’une augmentation de 98 % TTC [8] :
- Avoir un compteur électrique d’une puissance inférieure ou égale à 36 kVA,
- Employer moins de 10 personnes et avoir un chiffre d’affaires, des recettes ou un total de bilan annuels qui n’excèdent pas 2 M€,
- Avoir un contrat dont le prix de la part variable (hors taxe, hors TURPE [9]) est inférieur à 230 €/MWh.
Dans le cas où une telle entité respecterait les deux premières conditions mais aurait signé ou renouvelé en 2022 un contrat dont le prix de la part variable (c’est-à-dire hors taxe et hors TURPE) est supérieur à 230 €/MWh, soit 280 €/MWh hors taxe, alors c’est ce plafond qui s’applique pour toute l’année 2023.
PME / TPE, collectivités locales et associations de grandes tailles : La mise en place de l’amortisseur électricité
À compter du 1er janvier 2023, et jusqu’au 31 décembre de la même année, l’amortisseur électricité a pour objectif de protéger les entités ayant signé un contrat d’électricité de plus de 180 €/MWh (hors taxe et hors TURPE).
L’amortisseur consiste en la prise en charge par l’Etat, sur 50 % des volumes d’électricité consommés, de l’écart entre le prix de l’énergie du contrat et 180 €/MWh (dans la limite d’un prix de l’énergie plafonné à 500 €/MWh). La réduction du prix de l’électricité pourra ainsi s’élever jusqu’à 160 €/MWh sur la totalité de la consommation. L’amortisseur sera plafonné à 2 M€ au global sur l’année [10].
L’amortisseur d’électricité est destiné à toutes les PME [11], à l’exclusion de celles qui sont filiales d’un groupe non assimilable à une PME, et aux TPE non éligibles au bouclier tarifaire. Il s’applique pour un an, à partir du 1er janvier 2023 pour les contrats en cours ou les nouveaux contrats. L’aide est intégrée directement dans la facture d’électricité des consommateurs et l’État compensera les fournisseurs. Les consommateurs n’ont qu’à confirmer à leur fournisseur, dans une attestation sur l’honneur, qu’ils relèvent du statut de PME.
Cette aide concerne également l’ensemble des collectivités locales, leurs groupements, les associations à but non lucratif et les établissements publics opérant dans un secteur non concurrentiel.
Dans le cas particulier des TPE ou des collectivités locales et des associations assimilées qui ne bénéficient pas du TRVe, si celles-ci ont souscrit ou renouvelé leur contrat en 2022 et que le prix de la part variable (hors TURPE, hors taxes) est supérieur à 280 €/MWh, alors elles sont éligibles à l’amortisseur renforcé. Ainsi, le prix annuel moyen (hors taxes et hors TURPE) sera égal à 230 €/MWh. Dans tous les cas, pour bénéficier de l’aide, il faut remplir le formulaire et le transmettre à son fournisseur.
Toutes les entreprises grandes consommatrices d’énergie : La prolongation et l’extension du guichet d’aide au paiement des factures d’électricité
Ce guichet vise à compenser les surcoûts de dépenses d’électricité des entreprises grandes consommatrices d’énergie, afin de soutenir leur compétitivité et éviter les arrêts de production.
À compter du 1er janvier 2023, toutes les TPE et PME ou assimilées de droit privé peuvent bénéficier du guichet, si elles respectent les conditions d’éligibilité cumulatives suivantes :
- Elles doivent être éligibles au dispositif de l’amortisseur électricité ;
- Leurs dépenses d’énergie représentent au moins 3 % de leur chiffre d’affaires en 2021, ou plus de
6 % du chiffre d’affaire du 1er semestre 2022, après prise en compte de l’amortisseur ; - Leur facture d’électricité après réduction perçue via l’amortisseur, connaît une hausse de plus de 50 % par rapport à 2021.
S’agissant des ETI et des grandes entreprises, qui étaient d’ores et déjà concernées par le dispositif en 2022, leur éligibilité au guichet d’aide est prolongée jusqu’à fin 2023. Elles sont pour leur part soumises aux mêmes conditions d’éligibilité que pour les TPE/PME, à l’exception des entreprises qui présentent des dépenses d’énergie plus importantes qui pourront prétendre à une aide renforcée pour un montant maximal de 50 M€, et jusqu’à 150 M€ pour les secteurs exposés à un risque de fuite de carbone.
Les montants d’aides (appliqués à 70 % de la consommation de 2021) sont appliqués comme suit :
a. Pour les entreprises dont l’excédent brut d’exploitation (EBE) baisse (sans valeur seuil), une aide couvrant 50 % de la somme des coûts éligibles, plafonnée à 4 M€ d’aides maximum au niveau du groupe. Pour ces entreprises, peuvent être prises en compte les dépenses d’énergie de 2023 représentant plus de 3 % du chiffre d’affaires de la même période (sur 1 ou 2 mois) en 2021 ;
b. Pour les entreprises dont l’EBE baisse d’au moins 40 %, voire est négatif, une aide couvrant 65 % de la somme des coûts éligibles, plafonnée à 50 M€ maximum au niveau du groupe ;
c. Si en plus du b., les entreprises relèvent de secteurs soumis à une forte concurrence internationale, l’aide couvre jusqu’à 80 % de la somme des coûts éligibles, plafonnée à 150 M€ maximum au niveau du groupe.
Crise de l’énergie : quelles aides pour quels acteurs ?
Bouclier, amortisseur, plafonnement du prix, guichet d’aides, filet de sécurité...
Pour faire face à l’impact de la crise de l’énergie, le gouvernement a mis en place de nombreuses aides à destination des ménages, associations, entreprises et collectivités.
Pour y voir plus clair, l’Observatoire de l’Industrie Électrique publie un guide interactif.
Cliquez et vous saurez de quelle(s) aide(s) bénéficier. Mais pour cela, n’oubliez pas de transmettre votre attestation d’éligibilité.
Notes
[1] La TICFE a remplacé l’ancienne Contribution au Service Public de l’Electricité (CSPE)
[2] Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique. Pour plus d’informations, voir le site de la Commission de Régulation de l’Énergie.
[3] Source : Calcul UFE d’après les données du SDES et du CEREN pour l’année 2020.
[5] Estimations issues du Projet de loi de finances pour 2023 dans sa version initiale du 26 septembre 2022. Cette mesure concerne tous les consommateurs d’électricité dont la puissance maximale souscrite est inférieure ou égale à 250 kVA, et ce quel que soit leur type de contrat (offre de marché ou tarif réglementé de vente).
[6] Délibération de la CRE du 19 janvier 2023
[7] TPE = entreprises de moins de 10 salariés avec un chiffre d’affaires annuel inférieur à 2 M€ (cf. Décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique).
[9] Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Électricité
[10] Décret n° 2022-1774 du 31 décembre 2022
[11] PME = entreprises de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 M€ ou dont le total de bilan n’excède pas 43 M€.