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Prix de l’électricité en France : Facture d’électricité, où en est-on ?

L’électricité constitue un bien essentiel pour les ménages et les entreprises, c’est pourquoi le niveau de son prix est central pour l’économie française.
L’OIE présente dans cette note l’évolution historique du prix à la consommation de l’électricité, son niveau relatif par rapport aux autres pays de l’Union européenne, ainsi que les trois briques qui le constituent.

Les points-clés

  • Le prix de l’électricité en France a augmenté durant plusieurs décennies à un rythme inférieur à celui de l’inflation. Plus récemment, le prix de l’électricité a augmenté à un rythme légèrement supérieur à celui de l’inflation, dans un contexte d’envolée des prix du gaz aggravée par la guerre en Ukraine et dans une moindre mesure de hausse du prix de la tonne de CO2.
  • L’électricité française fait partie des moins chères d’Europe. Les ménages français ont eu en moyenne une facture inférieure de 17 % à celle de leurs voisins européens en 2021.
  • La facture d’électricité des ménages français se décompose en trois parties comptant pour un poids similaire : fourniture, réseaux et fiscalité. C’est cette dernière part qui a le plus augmenté entre 2012 et 2022.

NB : Dans un contexte de fortes évolutions des prix d’approvisionnement et de mises en place de dispositifs exceptionnels tels que le bouclier tarifaire, la présente note s’efforce de présenter des évolutions et des structures tendancielles.

I. Évolution des prix de l’électricité en France

Selon les données de l’Insee relatives à l’évolution des prix à la consommation pour les ménages français, le prix pour le consommateur final de l’électricité a été marqué par une évolution inférieure à celle de l’inflation jusqu’en 2016. Il a même diminué à la fin des années 1990, stagné durant les années 2000, avant de retrouver son prix de 1996 en 2010 seulement. En revanche, depuis le début des années 2010, le prix de l’électricité a augmenté plus rapidement, en raison notamment de la croissance de la fiscalité.
Son augmentation s’est effectuée au rythme de l’inflation entre 2016 et 2019 et s’est accentuée depuis, si bien que le prix de l’électricité évolue désormais légèrement au-dessus de l’inflation.

Cette augmentation maîtrisée des prix de l’électricité sur une longue période a généré un avantage en termes de pouvoir d’achat pour les ménages français. Les entreprises françaises ont également bénéficié de cette évolution raisonnée. L’électricité présente l’avantage d’avoir un prix plus stable sur une longue période que les produits pétroliers. Cela est dû en particulier au pouvoir d’oligopole qu’exercent les pays exportateurs comme la Russie ou via l’OPEP ainsi qu’à leur dépendance aux aléas géopolitiques qui peuvent se traduire par des pics de prix durables étalés sur plusieurs mois, comme ce fut le cas en 2008 ou bien encore depuis février 2022. Enfin, dans un contexte de lutte contre le changement climatique, les énergies fossiles devraient voir leur taxation augmenter afin d’envoyer des signaux de prix en cohérence avec les objectifs de neutralité carbone actés lors de l’Accord de Paris.

II. L’électricité française : une des moins chères d’Europe de l’Ouest

Si la relative stabilité du prix de l’électricité a bénéficié tant aux ménages qu’aux entreprises françaises, ce niveau de prix est également un avantage comparatif sur la scène européenne. En effet, le prix de l’électricité pour les ménages français est parmi les plus bas en Europe de l’Ouest (194 €/MWh en 2021) et est inférieur de 17 % à la moyenne des pays membres de l’Union européenne.
S’agissant des clients industriels, le niveau des prix de l’électricité en France est également un facteur de compétitivité. En effet, selon les données Eurostat, les entreprises françaises payaient en moyenne leur électricité 27 % moins cher que les entreprises implantées au sein de l’Union européenne en 2021.

La structure du parc de production d’électricité français explique en partie cette bonne performance. En optant dès les années 1970 pour un mix électrique reposant fortement sur les technologies nucléaires exploitées dans un parc standardisé et hydroélectrique, la France a produit son électricité à un coût relativement faible et stable. Cet avantage a également eu un impact positif sur la balance commerciale de la France (environ 2 Mds€ d’export par an).
Cependant, depuis le début de l’année 2022, la faible disponibilité du parc nucléaire, associée à la forte hausse des prix des énergies fossiles, à l’impact de la sécheresse sur la gestion des stocks hydrauliques et au retard pris dans le développement de l’éolien et du photovoltaïque, devrait rendre cet impact sur la balance commerciale négatif pour cette année.
Derrière cette évolution globale du prix de l’électricité se cachent cependant des réalités différentes, qui ont trait à la structure même de la facture d’électricité.

Facture moyenne des Français
Parmi les trois vecteurs énergétiques communément utilisés pour le chauffage, c’est-à-dire le fioul, le gaz et l’électricité, la facture des ménages se chauffant à l’électricité s’avère être la moins élevée, avec
599 €/an de chauffage, suivi par le chauffage au gaz avec 664 €/an
. Le chauffage au fioul est le plus onéreux avec une facture moyenne de 783 €/an. Si l’on tient compte de l’utilisation de bois comme source de chauffage secondaire, les ménages utilisant l’électricité pour se chauffer dépensent 780 €/an, ceux utilisant le gaz 782 €/an alors que ceux ayant recours au fioul dépensent au total 1 137 €/an [1]. En tenant compte de la superficie moyenne des logements, le chauffage électrique (en plus du bois) reste la solution la plus économe avec un coût d’environ 8,5 €/m².

III. Structure de la facture d’électricité : fourniture, réseaux et fiscalité

Afin de comprendre les déterminants qui influencent l’évolution de la facture d’électricité des industries et des ménages français, il convient de s’intéresser à ses composantes et à leurs évolutions dans le temps. La facture d’électricité peut être divisée en trois parties :
• Le coût associé à la fourniture d’électricité ;
• Le coût associé à l’acheminement de l’électricité (les réseaux) ;
La fiscalité.

Le coût de la fourniture d’électricité correspond aux coûts liés au financement des moyens de production – charges d’exploitation et de capital – ainsi qu’aux coûts relevant de la commercialisation de l’électricité tels que la facturation, le service clients, les Certificats d’Economie d’Energie (CEE) ou la traçabilité de l’origine de la production de l’électricité [2]. Le coût d’acheminement de l’énergie consommée est la part relative au Tarif d’Utilisation des Réseaux Publics d’Electricité (TURPE), destiné à couvrir les coûts des réseaux de transport et de distribution d’électricité. Enfin, s’ajoutent à ces deux premières strates l’ensemble des taxes associées à l’électricité, les deux plus importantes étant la TVA et la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) qui remplace l’ancienne Contribution au Service Public de l’Electricité (CSPE).

Comme illustré dans le graphique ci-dessus, ces trois composantes ont connu des évolutions différentes entre 2012 et 2021. En effet, alors que le coût de la fourniture d’électricité augmentait de 22 % et que celui d’acheminement de l’énergie progressait de 17 % en 9 ans, la fiscalité connaissait une croissance de 50 %. Une évolution faisant de la fiscalité le deuxième poste le plus important de la facture électrique des Français.

Tarifs réglementés et offres de marché
L’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité a été initiée par la directive 96/92/CE. Cette directive a été transposée au niveau national en ouvrant progressivement la concurrence pour différentes catégories de consommateurs d’électricité. Depuis 2007, le marché de l’électricité est ouvert à la concurrence pour la totalité des clients.
Depuis, un consommateur particulier a ainsi la possibilité de souscrire à deux types d’offres :
• soit le Tarif Réglementé de Vente (TRV), fixé par le gouvernement sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), et que seuls les fournisseurs historiques d’électricité, EDF et les Entreprises Locales de Distribution (ELD), peuvent proposer
• soit une offre de marché, déterminée par un contrat, que peuvent proposer l’ensemble des fournisseurs.

Les parts réseaux et fiscalité ne variant pas en fonction des fournisseurs, c’est uniquement sur la part fourniture d’électricité que se base la différence de prix entre les différentes offres [3].
Pour mieux comprendre ces évolutions, chacune de ces composantes est détaillée dans trois notes de l’Observatoire de l’Industrie Électrique :
La fourniture de l’électricité
L’acheminement de l’électricité
La fiscalité de l’électricité

Notes

[1Reconstruction par l’UFE de la facture moyenne des Français en matière de chauffage pour l’année 2020 par type d’énergie, sur la base des données publiques relatives aux consommations énergétiques dans le bâtiment mises à disposition par le Centre d’études et de recherches économiques sur l’énergie (CEREN) et des données de prix publiées notamment par le Service de la donnée et des études statistiques rattaché au ministère du Logement, de la transition énergétique et des transports.

[2Pour aller plus loin sur les Garanties d’origine : OIE, « Les garanties d’origine : développement et perspectives », novembre 2019

[3Par souci de simplicité, les prix de l’électricité étudiés dans cette note seront généralement ceux associés aux TRV.